les "Histoires de Jacques" (18)

La chasse aux taupes...

Jacques DASSIÉ

      Retour d'un vol sans histoire, en compagnie d'un vieil ami pilote, sur un NC 854, vers un terrain familier, un de ces aérodrome de la France profonde. C'était il y a… houla ! Beaucoup d'années, de l'ordre du demi-siècle ! Les conditions météo étaient exceptionnelles : beau fixe avec une véritable mer d'huile ! C'est-à-dire : un temps ecclésiastiquement très correct!



      Mon collègue me dit qu'il est un peu pressé et que ce serait bien si l'on pouvait se poser un peu court et prendre la première bretelle. Sitôt dit, sitôt fait : deux crans de volets et l'on augmente la pente en conséquence. Arrondi parfait, petit friseli des pointes d'herbe sous les roues et… BOUM ! Un choc énorme qui nous propulse à trois ou quatre mètres de hauteur…

      Ne sachant pas ce qu'il vient d'advenir, je mets un coup de moteur pour amortir la redescente. Nouvel arrondi et atterrissage apparemment tout à fait normal. Au parking, je me précipite faire le tour de la machine et, horreur, le fuselage est tordu en zig-zags horizontaux, le bloc dérives semblant toutefois en position correcte !



      Affolement, on appelle tout le monde et j'essaie de comprendre. Il ne s'agit pas d'un boum classique, je ne touchais pas encore le sol (palier de décélération) quand cela s'est produit. Et pourtant, ce choc à l'arrivée… On part examiner l'entrée de bande gazonnée et là, surprise, un petit monticule de terre se devine dans l'herbe un peu haute. Il porte une incontestable trace d'écrasement par un pneu !


Pons (17) Le donjon du Château du 12e siècle.

    Une taupe ! C'est une taupinière noyée dans l'herbe et que la roue droite a heurté, causant ce violent choc dissymétrique ! Mais l'avion me paraît sévèrement touché, foutu, peut-être ! L'origine ainsi découverte, peu fier, je rends visite au Président du club, pour l'informer directement et pour discuter avec lui des modalités de la déclaration d'accident. 

    Il m'a conseillé de me calmer et donné rendez-vous sous 48 heures… Il tenait à tout voir et constater par lui-même, ce qui me parut tout à fait normal. Mais je n'ai jamais réussi à remplir cette foutue déclaration : le lendemain, le NC n'était plus dans son hangar, pas plus que ses documents. Il y est réapparu une dizaine de jours plus tard, avec un fuselage parfaitement en ligne, sans aucunes traces de réparation, revolant comme si rien ne s'était jamais passé. Je pense que des tubes de la structure ont dû flamber symétriquement, mais suffisamment peu, pour qu'il soit possible de les redresser. Et je n'ai jamais connu le fin mot de l'histoire !


NOTA  Aucun des participants directs de cette petite aventure n'est plus de ce monde, sauf l'auteur. Le Président était également directeur d'une petite entreprise d'entretien et de réparation d'avions légers... Il a probablement oeuvré avec beaucoup de discrétion pour le bon équilibre financier du club. Décédé accidentellement au cours d'un vol d'essai sur son avion personnel.

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